La braderie lilloise
Tout bien pesé, je n’ai absolument rien contre Lille.
Il parait que c’est une ville jeune avec une grande braderie
entourée de moules et de frites. Que du bonheur en somme (même hors de la Baie).
Il se dit dans les milieux autorisés qu’il y aurait une équipe
de football bien qu’il n’y ait pas de stade. La rumeur court que Lille jouerait
en ligue des Champions.
Alors Lille – Milan, pensez donc, le troisième de Ligue 1 de l’an
passée contre le troisième du Calcio (classement obtenu après négociations des
magouilles italiennes du dernier championnat).
Mais le Milan, c’est le Milan, c’est l’histoire, c’est le sextuple
vainqueur de la C1, c’est Paolo Maldini, Berlusconi, c’est l’escalope.
Et Lille, c’est la braderie.
Alors pensez donc, le lillois demande logiquement un autographe
au milanais, veut son maillot, veut se faire prendre en photo avec l’équipe italienne,
veut une place à San Siro pour leur prochain match.
Et donc, après un match nul (mais agréable cependant pour peu
qu’on ne regarde que la dernière demi-heure les yeux à moitié fermés de fatigue
d’un entraînement footballistique de fin de journée) 0-0 à Félix-Bollaert, dans
l’antre des casques sang et or, c’est la fête, la satisfaction de l’exploit
réalisé, la béatitude réjouie.
L’Equipe le reconnaît sur son site avec le titre : « Lille
a tenu bon ».
Et comme la ligne éditoriale est cohérente (bien que peu
inspirée) dans le groupe journalistique, la première page du quotidien le
confirme : « Lille tient le choc ».
Mesdames, messieurs, la diatribe suivante va choquer mais faut
arrêter de déconner.
Y’en a marre de tenir le choc, y’en a ras les roubignoles de se
gausser d’un match nul obtenu de haute lutte, ç’en est à braire de lire,
écouter, regarder, ses autosatisfactions navrantes de Lille qui accroche le
Milan AC.
Rappelons l’objectif d’une compétition dans un milieu sportif
professionnel et qui plus est perturbée par les données financières
trébuchantes : gagner.
Non, Môsieur, Lille ne doit pas être content de faire un nul à
la maison, surtout après avoir décroché un même nul encore plus nul à
Anderlecht il y a quinze jours.
Non, Môsieur, ce n’est pas bien d’être content de ne pas avoir
perdu. Il ne s’agissait pas de contrôler le match mais d’aller chercher les 3
points dans ce mini championnat à 6 rencontres.
Non, Môsieur, la France n’a pas à être heureuse car il faudra
bien que ses clubs comprennent qu’ils ont changé de statut, qu’il y a eu bien
des occasions de remporter ces compétitions européennes depuis 15 ans, que la France
a été championne du Monde et vice aussi, championne d’Europe aussi ces 8
dernières années, que les clubs nationaux, s’ils le veulent doivent terminer
dans le dernier carré de chaque Coupe d’Europe.
Il est tellement bavasser que les autres championnats majeurs
sont les plus forts que nous sous-estimons nos équipes.
Lille et Lyon ont la stabilité du haut niveau depuis quelques
années. Ils doivent des résultats, le contraire serait une faute professionnelle.
Ah oui mais les autres clubs richissimes sont meilleurs, avec
les moyens, les joueurs, le dopage non contrôlé, les intérêts fiscaux, les
dessous de short des arbitres…
Ah non, car comment Paris aurait pu un jour trucider le Real
Madrid 4-1, comment Bordeaux aurait pu éliminer le grand Milan aussi 3-0,
comment Marseille aurait gagner contre le Milan encore, comment Lyon aurait
reporté nombre de ces dernières rencontres contre la Lazio, l’Inter…, comment d’autres
victoires appelées « exploits » ?
Mais les statistiques prouvent qu’un club français va gagner qu’une
fois sur dix à cause justement des paramètres structurels et financiers des
clubs.
Mais tu sais ce que je leur dis aux statistiques aussi fiables
qu’un sondage ?
Attendez un peu que je m’occupe de la prochaine élimination de
Lyon en quart de finale au printemps 2007 parce que ça va bien d’écraser avec
la manière le Real Madrid, de pulvériser des roumains dans leurs roulottes mais
qu’en est-il réellement en terme d’efficacité de résultats ?
Si je comprends bien la culture française de la victoire, nous
avons toujours cette historique tunique de l’outsider.
Alors si Lille n’est là que pour participer, qu’elle laisse la
place à d’autres clubs qui se donneront les moyens de leurs ambitions.
Si je tenais cette andouille de Coubertin qui continue de faire des émules et des mules aussi…