La potée ose du succès (proverbe auvergnat)
Tout s’est déroulé le soir.
Il suffisait de rentrer du travail à une heure indue, proportionnellement
au salaire versé et d’ouvrir son courrier incidemment pendant que les nains finissaient
d’asperger les murs de la cuisine de grains de riz.
Dans ce sachet plastique gris bleu, il y avait ma revue du mois
de septembre. Ma préférée de part son contenu.
Je la déplie avec délicatesse et la porte sur le lit conjugal
pour la lecture d’avant sommeil.
Les trépidations de ma vie m’ayant poussé à éplucher deux
oranges, manger un melon et regarder les premiers épisodes ternes de la
nouvelle saison d’Urgences, je m’en allais, claudiquant vers ma couche.
Je lisais un bout de Science&Vie pour me donner bonne
conscience puis attaquais avec satisfaction mon magazine.
Je feuillette, lis les titres des articles en diagonale, m’arrête
sur un dessin et reviens à l’édito.
Je continue la page et tombe les yeux ébahis sur ces mots que je
connaissais.
- Ben c’est pas vrai ! C’est dingue ! Hé regarde chérie, regarde, mais regarde que je te dis ! » Dis-je en attrapant un coin de son tee-shirt chemise de nuit informe et en le secouant vigoureusement dans tous les sens que la décence permet.
- ‘gad’ donc ! C’est moi, hé, c’est moi ça ! T’as vu,
ils ont publié un truc que je leur ai envoyé ! Oh ben dis donc »
Je passe le journal à la mère de mes enfants qui se fatiguait à
lire deux Bernard Werber à la suite, je lui montre du doigt le passage et relis
par-dessus son épaule avec quelques pouffements de contentement.
J’attendais sa réaction.
- Consternant, c’est consternant.
- Ah oué, t’as vu c’est vraiment moi, rho dis donc, c’est ma
première publication ! Et en plus ici !
- T’as vu que c’est dans la rubrique des lecteurs intitulée :
« On a vraiment reçu ça » ?
- Hein ? quoi, oui, mais bon. Dis donc.
Je reprenais le magazine pour relire une nouvelle fois ces mots
glissés dans la boite à message de leur site.
Je secouais frénétiquement les jambes, m’asseyais, me
rallongeais.
Certes, je remuais la cuisse droite avec plus de difficultés
que la gauche à cause de l’entraînement de mardi soir où j’ai poussé mes
muscles dans les derniers retranchements de cette reprise sportive.
(Je ne disais pas à ma dame que, comme quoi, il y a bien des
moyens de se secouer la cuisse sans elle).
Je repensais à ce mot : consternant. Et en fait, j’en tire
une fierté particulière. Si. Une fierté assez proche de la perfection morale.
Si.
Donc, courez acheter Les Cahiers du Football n°28
Si vous voyez une histoire de fer à repasser sur la première
page, vous saurez.
Je m’excuse par avance de la faible portée de ce blog sur l’explosion
des ventes du mois, voire de la possible influence négative.
Avec un peu de recul, je m’aperçois que cette note est également
consternante.
C’est important de maintenir l’effort et de confirmer.